Suter Martin: Allmen et les libellules

Johann Friedrich von Allmen, élégant gentleman d'une quarantaine d'années, est issu d'une très riche famille suisse. Bel homme, raffiné, séducteur et collectionneur d'art, il a dilapidé avec imprudence les millions dont il avait hérité de son père. Au début du roman, il habite encore dans le somptueux immeuble qui appartenait à sa famille mais n'y est plus que le locataire de l'entreprise à laquelle il a été vendu. Dilettante et relativement désoeuvré, il s'est attaché les services d'un marjordome guatémaltèque, Carlos, qui l'appelle Sir John et lui parle dans un espagnol du plus basique (ce qui produit des dialogues particulièrement désopilants). En plus des dettes, il s'est attiré les rancoeurs de nombreuses personnes du fait de sa fâcheuse tendance à dérober, avec la plus grande habileté, les oeuvres d'art de ses fréquentations. Sa situation financière s'étant détériorée à l'extrême, Allmen a dû vendre toutes les pièces précieuses qu'il avait acquises au receleur dont il était auparavant le principal client. Il s'est ensuite retiré dans une modeste maison de campagne en compagnie de Carlos. La chance semble tourner lorsqu'il rencontre Jojo, une belle femme dans la fleur de l'âge. Après une nuit d'amour passionné, il découvre dans la magnifique demeure où elle l'avait entraîné, cinq coupes art déco à motif de libellules, chacune valant une petite fortune, chacune porteuse d'un secret. Il décide de s'en emparer sur le champ. Mais l'opération va prendre quelque temps car, comme pour ses précédents forfaits, Allmen multiplie ruses et précautions, pour le plus grand plaisir du lecteur qui suit ces rebondissements et péripéties particulièrement cocasses. Déployant tout son talent de scénariste, Martin Suter mène l'histoire d'une main de maître. Les dialogues sont fulgurants, drôles, les descriptions rapides et d'une rare efficacité. Avec Allmen et les libellules, Martin Suter inaugure un nouveau projet littéraire : une série policière avec un héros récurrent, Johann Friedrich von Allmen, toujours secondé de son fidèle majordome, Carlos. Martin Suter se réapproprie ainsi la tradition du roman feuilleton et du duo d'enquêteurs (Rouletabille et Sinclair, Holmes et Watson, Maigret et Lucas) en vogue à la fin du XIXe et au début du XXe siècle en y ajoutant quelques traits de caractères des personnages un peu perdus du roman noir américain pour créer son propre couple de personnages. Le résultat est d'une inventivité, d'un rythme et d'une drôlerie sans pareille. Un premier volume particulièrement prometteur pour la suite. Chaque roman est un hommage à un genre littéraire. Celui-ci renvoie aux séries policières. La suite arrive. (Martin Suter) Martin Suter est né à Zurich en 1948. Après avoir été publicitaire à Bâle, il multiplie les reportages pour Géo, il est devenu scénariste pour le cinéaste Daniel Schmidt et a écrit des comédies pour la télévision. Depuis 1991 il se consacre à l'écriture de romans qui sont devenus de véritables best-sellers. Il vit entre la Suisse, l'Espagne et le Guatemala. Small World a obtenu le prix du Premier Roman dans la catégorie romans étrangers. Il sera prochainement adapté au cinéma avec Gérard Depardieu et Nathalie Baye. Un ami parfait a été adapté au cinéma en 2006, sous le même titre, par Francis Girod et deux autres de ses romans sont en cours d'adaptation. Martin Suter a également contribué au dernier album de son compatriote le musicien Stefan Eicher, pour qui il a écrit les textes de trois chansons sur Eldorado (2007) et travaillé au projet d'une comédie musicale. Le premier volume de cette nouvelle série policière est publié tandis que l'adaptation cinématographique de Small World par Bruno Chiche (avec, entre autres, Gérard Depardieu et Nathalie Baye) sort sur les écrans le 30 mars 2011. Allmen et les libellules doit ouvrir une nouvelle série de romans policiers de l'écrivain suisse. Escroquerie, vol et assassinat sont inclus dans le prix. Mais au lieu de scénarios sanguinolents, Suter nous sert un repas policier délicieux, subtil et un rien désuet, qui ouvre l'appétit pour la suite. Frauke Kaberka, Die Berliner Literaturkritik, 25 janvier 2011. Alors que nous allions justement déplorer le manque d'invention d'enquêteurs pour séries policières, ce type a croisé notre chemin à Zurich. Son aspect le distingue notablement de tous les collègues qui, au cours des trente dernières années, ont travaillé dans la littérature policière européenne à augmenter les taux d'élucidation de leurs pays. Il porte un costume à la coupe impeccable en toute circonstance - on l'imagine encore volontiers élégante tandis que son détenteur se livrerait à la plus compliquée des positions de yoga ; une chemise d'une couleur qu'aucun des enquêteurs moyens à la lisière du prolétariat ne serait capable de décrire ; une cravate fine, des gants sur mesure. [...] Johann Friedrich von Allmen - ainsi s'appelle notre héros - boit le matin une tasse de café crème - ce que personne ne fait plus, même à